mercredi 19 janvier 2011

BWV 564

Et tu es qui toi, hein ? Redescends un peu sur la terre que tu n'as jamais quittée. Sois terrien, sache-le, souviens t'en et cesse de vouloir prendre de la hauteur. Brûle tes livres. Et puis enfin, remballe-moi ce sourire en coin. Range-le, ce sale petit sourire en coin qui te déshonore et te rend plus laid que tu n 'es déjà. Tu seras ironique avec les vers et les lichens, va. Tu seras ironique quand ton squelette au fond de la tombe n'aura plus que ça pour montrer qu'il a été vivant autrefois, qu'il n'a pas toujours été une pierre. Un grand sourire sans nuance, tu feras, une grimace inerte et froide, avec deux trous noirs au-dessus, où nicheront peut-être des cloportes aveugles dans leur lit d'humus. Une grimace qui ne veut rien dire, une grimace parce que c'est comme ça. Un souvenir de sourire, rendu à l'univers.

Et pourtant d'autres fois, quelle pitié j'ai de toi et de tes émouvantes tentatives d'être doux avec le monde pour qu'il t'épargne, pour qu'il cesse d'être terrifiant. Marchons lentement dans la rue, avec des pas bien mesurés, bien sages, et ne prenons pas trop de place, ne faisons pas trop de bruit, tassons-nous un peu et n'ayons pas une expression trop agressive, car je ne suis pas le chef ici et que tout me dépasse. Quelle tendresse pour ton silence suppliant et résigné devant Bach, qui te rappelle ta condition mieux que tout. Cette humilité, il faudrait la conserver mais ne pas être triste. Il faudrait tout le temps rester humble, et ne pas faire de la conscience du désespoir une fierté.

Ne t'accable pas. Ne t'accable pas.